David Labouré : « Depuis que je suis entré dans l’entreprise, nous avons toujours eu du travail »

Ce n’est pas encore l’histoire d’une saga familiale — deux générations seulement, pour l’instant, ont dirigé l’entreprise Labouré — mais c’est celle d’une belle transmission père-fils qui a duré… plus de quinze ans.

Christian et son fils David Labouré, plombier-zingueur pour le premier et plombier-chauffagiste pour le second, sans oublier Ginette, l’épouse de Christian et donc la maman de David, ont travaillé ensemble pendant de longues années, côte à côte, sur les chantiers, au dépôt ou au bureau. Sans aucune anicroche, et toujours avec du travail.

Ce type d’histoire, souvent réservé aux seuls secteurs du Bâtiment, de l’Agriculture ou du commerce de détail, est une ode à la main tendue, à la transmission du geste et du savoir-faire, à la formation, à la confiance et au respect mutuel. Témoignage.

Quelle est l’histoire de l’entreprise Labouré ? Quand a-t-elle été créée ?

En 1997, par mon père Christian, qui avait alors 45 ans. Il était plombier salarié à la Générale des Eaux depuis des années quand il s’est lancé. Je crois qu’il a attendu que ma sœur et moi soyons indépendants, ou du moins « en fin d’études », pour voler de ses propres ailes. Il a créé l’entreprise à Tarare, où nous habitions, et où nous sommes toujours installés. C’était à l’origine une entreprise de plomberie-zinguerie.

Et vous, David, quelle a été votre formation, votre parcours avant de rejoindre l’entreprise ?

Après un BEP de menuiserie, j’ai voulu passer un BP Menuiserie-Ébénisterie en alternance. Cela devait durer deux ans… j’ai tenu deux mois. Ensuite, j’ai été magasinier dans une entreprise de textile, puis j’ai rejoint mon père en octobre 1999.

À votre demande ou à la sienne ?

J’avais fait le tour du métier de magasinier. J’avais démissionné et cherchais autre chose. Mon père, qui commençait à avoir beaucoup de travail, m’a habilement proposé un contrat de trois mois pour le dépanner sur un gros chantier… le temps que je trouve un emploi. Et je suis resté.

Vous avez donc été formé sur le tas au métier de plombier ?

J’accompagnais souvent mon père le week-end quand il aidait ses copains. Dès qu’il y avait une bricole à faire, j’étais avec lui. J’ai baigné dans le métier depuis tout petit : la plomberie, le chauffage, et même le bâtiment au sens large. Même sans avoir appris le métier à l’école, je connaissais déjà pas mal de techniques. Et puis, nous bricolions souvent ensemble à la maison. À ses côtés, j’ai aussi appris la zinguerie, qui représentait environ 20 % de son activité au départ.

Justement, quelle était votre activité à l’époque ?

Nous faisions 40 % de chauffage, 40 % de plomberie-sanitaire et 20 % de zinguerie, principalement pour des particuliers du secteur de Tarare.

Un associé depuis trois ans

Vous avez abandonné le travail du bois ?

Oui. Je crois que je m’étais orienté vers ce secteur par effet de mode. Il y avait aussi la noblesse du matériau. Mais mon père m’a vraiment transmis la passion de ce métier de plombier-zingueur, même si nous avons abandonné la zinguerie après son départ de l’entreprise, il y a huit ou neuf ans.

Comment s’est passée la transmission ?

Naturellement. Mon père avait lui-même décidé de la date de son départ. Il avait quand même 64 ans. Il passe toujours à l’atelier, pas tous les jours, mais presque. Nous avions évoqué la succession bien avant son départ. Il avait même embauché un de mes amis du rugby en prévision, afin que je ne me retrouve pas seul sur les chantiers.

Un plombier ?

Pas du tout. Damien Bajard était magasinier dans une société agroalimentaire. Un peu comme moi, il a décidé un jour d’arrêter, de reprendre sa vie en main, et de faire ce qu’il aime. Il a donc suivi une formation accélérée pour adultes en plomberie-chauffage, tout en étant apprenti chez nous. Cela fait seize ans. Et il y a trois ans, il est devenu mon associé dans l’entreprise Labouré.

Une belle histoire d’amitié qui devient histoire de transmission et de projet commun… Vous êtes combien aujourd’hui dans l’entreprise ?

Nous sommes six, dont un apprenti. Nous sommes toujours plombiers, nous réalisons toujours des salles de bains et des sanitaires, mais nous installons de plus en plus de chauffages, de pompes à chaleur et de climatisations. Nous avons suivi la demande.

Faites-vous de la maintenance ?

Uniquement sur les pompes à chaleur et les climatisations que nous installons. C’est un volet de notre activité que nous avons prévu de développer.

Alors, comment se porte l’activité dans votre secteur, à la fois géographique et professionnel ?

Depuis que je suis entré dans l’entreprise, nous avons toujours eu du travail. Nous avons juste connu une période un peu difficile en 2008, comme tout le monde. Un matin, nous nous sommes retrouvés au dépôt, mon père et moi, sans chantier ni projet. Et alors que nous nous demandions ce qu’on allait faire de la journée, un client a franchi la porte pour nous demander de lui refaire une salle de bains, au plus vite : c’était un militaire sur le point de repartir en mission. Une heure plus tard, je cassais l’ancienne salle de bains pendant que mon père l’aidait à choisir les sanitaires. Incroyable. C’est le seul moment critique en plus de 26 ans de métier dont je me souvienne. Je sais que pour d’autres collègues, cela a pu être plus difficile, mais nous avons eu cette chance de toujours travailler.

« Nous ne nous sommes jamais disputés »

Et aujourd’hui, dans ce contexte compliqué ?

Nous avons de l’activité : chaudières à gaz, pompes à chaleur, climatisations… Nous avons du travail, mais nous faisons aussi tout ce qu’il faut pour en avoir. Nous essayons d’être sérieux, appliqués, réactifs. Bref, nous mettons tous les ingrédients pour que la qualité de notre travail soit reconnue.

Cherchez-vous à recruter ?

Nous avons un apprenti que nous espérons pouvoir garder. Nous avons toujours eu des apprentis : c’est un marqueur de l’entreprise, et une réponse aux gros problèmes de recrutement dans notre profession. Même s’il arrive qu’ils nous quittent pour s’installer à leur compte… ce qui est une belle aventure, que nous comprenons.

Question plus personnelle : comment fait-on pour travailler autant d’années avec son père… et l’un de ses amis ?

En prenant bien soin de faire chacun la part des choses, et en ayant beaucoup de respect l’un pour l’autre. On parle boulot la semaine, mais jamais le week-end, par exemple. Avec mon père, nous ne nous sommes jamais disputés. Je ne sais pas pourquoi, je n’ai pas de recette : nous nous sommes toujours très bien entendus. Avec Damien, c’est pareil. Quand on se voit à l’extérieur, on essaie de laisser l’entreprise à l’écart de nos conversations.

Pensez-vous transmettre, vous aussi, l’entreprise à vos enfants ?

J’en ai deux, encore jeunes, 18 et 13 ans, qui ne sont pas intéressés pour l’instant. Et je ne suis pas obnubilé par l’idée de transmettre à ma fille ou à mon fils. Ils feront absolument ce qu’ils veulent quand ils auront l’âge de décider. Mon associé a aussi deux enfants, deux garçons de 11 et 5 ans… c’est un peu tôt pour s’engager !

 

À lire dans l’édition du 22 mai 2025 du Journal du BTP