Marlène Archimbaud : « Il y a beaucoup de femmes qui n’osent pas, il faut les aider à se lancer »

Marlène Archimbaud : « Il y a beaucoup de femmes qui n’osent pas, il faut les aider à se lancer »

Métropole a décidé en ce mois de mars 2022 de rendre hommage aux femmes engagées dans les métiers du Bâtiment et des Travaux Publics.

Marlène Archimbaud, 33 ans, cogérante depuis 2018 de l’entreprise familiale Archimbaud TP avec son frère Florian, dont le siège est à Décines.

Quel est le secteur d’activité de votre entreprise ?

Nous faisons de la reprise de voirie, de la démolition, de l’aménagement extérieur et tous types de réseaux dans le neuf ou rénovation. Nous travaillons essentiellement pour des marchés privés, particuliers et industries, des régies d’habitations ou de parcs industriels.

Que faisiez-vous avant de rejoindre l’entreprise familiale ?

J’ai travaillé sept ans dans une clinique comme manipulatrice en radiologie, un monde de femmes. Mon frère m’a proposé de s’associer avec lui, j’ai intégré l’aventure. J’aidais déjà ma mère au bureau depuis quelques années en plus de mon métier.

Combien de femmes sur dix-huit salariés ?

Nous ne sommes que deux, mon assistante et moi. On ne trouve pas de femmes, et pourtant nous avons essayé. Dans notre secteur d’activité il y a très peu de candidates. Les métiers du TP ne sont pas encore assez ouverts, aménagés pour les femmes. A niveau de compétences égales, nous serions heureux d’avoir une femme parmi nous, nous avons d’ailleurs failli concrétiser un entretien qui s’était bien passé, mais elle a signé ailleurs. Une femme peut apporter beaucoup dans une équipe, pour poser, calmer, apporter un peu de sensibilité et de neutralité. Un peu de mixité fait toujours du bien, j’ai connu l’expérience inverse en étant dans une équipe de douze femmes et trois garçons, ils apportaient les mêmes effets.

Comment avez-vous été accueillie par le milieu BTP ?

Par les salariés il n’y a pas eu de problèmes, ils me connaissaient déjà, même s’ils ont pris le temps de vérifier que j’étais compétente à mon poste. Aujourd’hui cela se passe vraiment bien. Du côté de nos clients et fournisseurs, je me suis beaucoup présentée et j’ai été très bien accueillie.

Pensez-vous que le monde du BTP conserve quelques stéréotypes ?

Franchement oui, encore un peu. Mais le sujet de la mixité est vraiment travaillé par les instances, la fédération par exemple, c’est très agréable de suivre l’évolution. Ce n’est pas encore parfait, mais cela aide beaucoup de femmes à sortir de leur bureau et prendre confiance en elles.

Sur les chantiers, vous croisez beaucoup de femmes ?

En conducteurs de travaux oui, dans les poids lourds aussi, mais pas encore chez les maçons, manœuvres ou chefs d’équipes. Les hommes seraient pourtant les premiers ravis d’avoir du personnel féminin avec eux, je l’ai dit la mixité apporte toujours quelque chose de positif.

Vous êtes membre du groupe Femmes à la fédération BTP Rhône et Métropole ?

Oui, ce groupe est très solidaire, c’est un soutien au quotidien. Je suis également aussi aux Jeunes dirigeants avec Florian et j’ai un mandat à la Chambre De Commerce et d’Industrie Lyon Métropole et Région, où il y a un gros travail effectué sur la mixité.

Avec votre frère Florian, votre cogérant, avez-vous le sentiment que votre ressenti de femme apporte beaucoup ?

Oui. Est-ce parce qu’il s’occupe de la technique et moi de l’administratif, mais nous nous complétons vraiment bien. Nous voyons parfois les choses différemment, nous débattons souvent et c’est enrichissant.

Question piège, vous avez le même salaire ?

Oui bien sûr. Il n’y a pas de raison pour que ce soit différent. J’ajoute qu’il est même incroyable que l’on doive encore se battre sur de tels sujets.

Est-ce que le mois de la femme est encore nécessaire à vos yeux ?

C’est encore nécessaire. Il y a beaucoup d’efforts faits par les uns et les autres mais ce n’est pas encore fluide, naturel… Il faut continuer à représenter les femmes, ancrer notre présence dans la normalité, et ne pas être jugée selon notre sexe. Il y a aussi beaucoup de femmes qui n’osent pas, il faut les aider à se lancer.

Pour finir pensez-vous que les TP vont finir par s’ouvrir aux femmes ?

Il me semble que sur les chantiers cela va être encore long. En revanche, le nombre de femmes qui bougent, qui innovent, qui sortent de leur bureau, font du commercial, oui, cela va accélérer. Il y a aussi de plus en plus de femmes qui s’engagent dans les entreprises de recyclage, tri des déchets et autres sujets d’économie circulaire.

A lire dans l’édition du Journal du BTP du 17 mars 2022.